« Vous avez planifié le lancement du réseau mobile pour le 21 décembre 2020, sans business plan. Au cours d’une réunion que j’ai présidée en présence du régulateur le 16 décembre 2020 dans ce cadre, ce lancement avait été différé en raison des insuffisances règlementaires notoires à la mise en œuvre du réseau mobile. Dans un courrier reçu le 7 janvier 2021, vous m’invitez à présider le lancement du mobile pour le 13 janvier 2021, sans rendre compte de la levée des réserves formulées au cours de la réunion du 16 décembre 2020. Tout ceci ne permet non seulement pas d’assurer une entrée réussie de l’opérateur historique dans le segment de la téléphonie mobile (pourtant tant attendue), mais aussi de rassurer les acteurs du secteur sur la neutralité, la transparence, la non-discrimination et l’objectivité de Camtel à gérer les segments de monopole de fait (fixe, transport) », écrit la ministre des Postes et Télécoms dans une lettre adressée à la DG de Camtel, le 11 janvier 2021.
Concrètement, dans cette correspondance officielle, obtenue par investir au Cameroun, la ministre Minette Libom Li Likeng (photo) reproche à Judith Yah Sunday, le non-respect des prescriptions faites à Camtel par le gouvernement le 4 mars 2020, au moment de l’attribution à cette société d’État, de trois concessions d’exploitation des réseaux mobiles, d’exploitation des communications électroniques fixes, et d’exploitation d’un réseau de transport des communications électroniques.
Climat social tendu
« En effet, la réforme prescrite à Camtel, suite aux concessions qui lui ont été attribuées le 4 mars 2020 par le gouvernement, prescrit la mise en place d’un continuum organisationnel ouvert, avec la création en son sein des business units (trois au total, NDLR), en fonction de chacun des titres d’exploitation attribués », rappelle la Minpostel à la DG de Camtel. Ce membre du gouvernement souligne, par ailleurs, « qu’en lieu et place de la business unit mobile », Judith Yah Sunday a préféré « une task-force de 170 personnels (…) sans aucune précision sur les missions et les aspects liés à la gestion de cette unité ».
Dans la suite de sa correspondance, la ministre des Postes et Télécoms détaille bien d’autres « irrégularités » dénoncées cette fois-ci par le commissaire aux comptes de Camtel, et « qui ne concourent pas à la réussite organisationnelle et fonctionnelle prescrite par le gouvernement ». Il s’agit, entre autres irrégularités, apprend-on, des obstructions au contrôle de la gestion de l’entreprise ; l’immaturité avérée des projets de l’entreprise ; des entorses aux dispositions relatives aux nominations des personnels par la direction générale, « toute chose de nature à compromettre le climat social au sein de l’entreprise… »
Cette sortie de la ministre en charge des Postes et des Télécoms révèle le manque de sérénité qui prévaut à Camtel, à la veille du lancement de son réseau mobile, qui devra pourtant batailler sur le marché avec trois concurrents, par ailleurs plus expérimentés. Il s’agit de MTN, le leader du marché depuis plus de 20 ans ; Orange, le numéro 2 ; et Nextell, le 3e opérateur, quelque peu en perte de vitesse depuis bientôt 3 ans, à cause d’une bataille entre ses actionnaires.
Au demeurant, bien qu’étant de nouveau un « bleu » sur le marché du mobile au Cameroun (la filiale mobile de cet opérateur avait été privatisée au début des années 2000 au profit de MTN, NDLR), l’arrivée de Camtel sur le segment du mobile pourra provoquer des chamboulements sur le marché. En effet, cet opérateur historique est habitué à pratiquer des prix compétitifs, en dépit d’une qualité de service pas toujours au rendez-vous.
Par Brice R. Mbodiam
Investir au Cameroun
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